samedi 21 janvier 2012

Forez Fourme: pour comprendre et envisager l'avenir...

C’est un sujet douloureux que j’aborde avec vous aujourd’hui: la mise en liquidation judiciaire de l’entreprise Forez Fourme, qui devra cesser son activité le 31 janvier prochain.

Je veux tout d’abord apporter mon soutien aux 19 salariés de cette entreprise ainsi qu’aux 72 producteurs de lait inquiets pour leur avenir.

Forez Fourme est emblématique de notre région et de notre savoir faire puisqu’elle est l’une des deux dernières entités à produire la fourme de Montbrison AOC : le cas de cette entreprise ne peut laisser indifférent celui qui comme moi défend le « produire  Français » prôné par François Bayrou que je soutiens.

Des articles ont déjà été rédigés dans la presse, mon but ici n’est donc pas de les paraphraser mais plutôt de vous faire partager mon analyse. Ceci a été pour moi l’occasion de questionner des responsables syndicaux sur les raisons des difficultés rencontrées par Forez Fourme et d’évoquer les solutions.

Un peu d’histoire avant tout…
Forez Fourme est une des sociétés forézienne, crée en 1931, qui fabrique la fourme de Montbrison, sous la marque « Tarit » (Appellation d’origine protégée). Elle emploie 19 salariés et était implantée sur deux sites : un à Sauvain et l’autre à Saint Bonnet le Courreau.
Après avoir appartenu à plusieurs familles successives, elle a été cédée à l’Union régionale des coopératives de vente de lait (URCVL). Cette dernière regroupait 19 coopératives de collecte de lait, dont celle des Monts du Forez, qui comprend les 72 producteurs qui fournissent à Forez Fourme 10 millions de litres de lait par an dont 60% revendus en Italie, les 40% restants transformés sur place en fromage.
Après le démantèlement de l’URCVL, Forez Fourme a été reprise par M. J.P Durris en Juillet 2010. Les efforts remarquables et reconnus de ce dernier qui avait pourtant investi et décroché un contrat important avec le réseau des Leclerc, n’ont malheureusement pas évité la décision de mise en liquidation judiciaire du tribunal de commerce de Saint Etienne.

Un marché local en baisse, une concurrence forte et la fin des quotas laitiers…
Les difficultés qui ont amené à cette situation, sont multiples : la consommation de fromage bleu est en baisse en France, la consommation de fourme de Montbrison est très localisée à notre région.
Autre point notable, depuis 2003, la fin du système des quotas laitiers, accompagné d’une hausse des volumes, a marginalisé les coopératives trop spécialisées sur la seule collecte et revente de lait brut. Les laiteries et surtout les grands groupes se sont désengagés des contrats avec l’URCVL, ce qui a amené celle-ci à disparaitre.
Le contrat avec les établissements Leclerc a été plus long à développer et les volumes vendus ont été moins important que prévu.

Forez Fourme, pénalisée par son activité de distribution …
Forez Fourme, a aussi subit le manque de réseau commercial pour se développer, ceci aussi bien sous la gestion URCVL que sous la direction de Mr DURIS.
D’autres coopératives comme Sodiaal, qui ont fait le choix il y a 30 ans de devenir transformateur, (Yoplait, candia,..) ont mieux su tirer leur épingle du jeu.
Les investissements entrepris par M Durris et les marchés conclus avec de grandes chaines de distribution n’ont ainsi pas suffi.

Des négociations engagées entre la FDSEA et les groupes Lactalis et Soodial…
Faute de nouveau repreneur, des négociations se sont engagées par l’intermédiaire des responsables de la FDSEA, entre la coopérative des Monts du Forez, d’une part et les groupes Lactalis et Sodiaal, d’autre part. Malgré de nombreuses rencontres, officielles ou officieuses, à l’interprofession, chez la Préfète, la DDT, … aucune solution durable n’a pu aboutir. Depuis début Janvier, le lait est expédié en Italie, sur un marché « spot », a défaut d’autres solutions. Ceci implique des difficultés de gestion au quotidien, qui ne peut constituer une solution à long terme.
Les collectivités locales sont bien intervenues dans la mesure du possible, notamment le Conseil général, avec une enveloppe de 150 000 €,  mais leur aide est loin de couvrir toutes les pertes déjà enregistrées.

Depuis plusieurs semaines, devant l’urgence de trouver une solution, car le risque est l’arrêt de collecte à court terme, les organisations syndicales, FDSEA et Jeunes Agriculteurs, ont décidé de frapper un grand coup, en organisant une manifestation ce Mercredi 25 Janvier à 14 heures devant la sous préfecture de Montbrison (arrivée des tracteurs à partir de midi) .  Il s’agira, devant la sous-préfecture, de mettre tout le monde face à ses responsabilités, aussi bien les autres acteurs de la filière laitière que les Pouvoirs publics.

Les leçons à tirer pour l’avenir et des pistes de réflexion …
L’agriculture se marie mal avec l’ultra libéralisme, chaque région a ses spécificités et beaucoup d’investissements sont à faire, notamment en élevage, amplifiés ces dernières années par les mises aux normes des bâtiments pour se mettre en conformité avec les règles environnementales.
Je partage ce constat et me désole à titre personnel de la politique européenne  très libérale menée dans les années 2000 à 2005, ayant conduit à la suppression des quotas laitiers.
J’ajoute aussi que même si le marché s’est restreint, il existe malgré tout – plus de 400 tonnes de fromage ne sont elles pas encore produites ? - et il serait impensable qu’il ne puisse pas être absorbé et même étendu par les industries locales existantes.
Enfin, oui les pouvoirs publics doivent assumer leur responsabilité et l’état doit assurer sa mission régalienne en favorisant les négociations, par exemple en donnant des garanties aux repreneurs potentiels.

François Bayrou réagissait déjà, en juillet 2009 …
En Juillet 2009, suite aux déclarations de Bruno Lemaire, ministre de l’agriculture, reculant sur la position française jusque-là acquise de défense des quotas laitiers, François Bayrou réagissait en estimant que la position du ministre sur les quotas laitiers s'apparentait à "une retraite en rase campagne" trahissant les "engagements répétés" du gouvernement. François Bayrou ajoutait : "L'annonce par le nouveau ministre de l'Agriculture de l'abandon par le gouvernement français de la défense des quotas laitiers est une retraite en rase campagne contraire aux engagements répétés notamment pendant la campagne européenne ».  "Les quotas laitiers ont permis pendant trente ans de maintenir des petites exploitations d'élevage sur l'ensemble du territoire national particulièrement dans les zones difficiles", a-t-il rappelé. "De nombreux assauts ont été menés contre cette politique des quotas laitiers par les pays qui voient d'un bon œil l'industrialisation de l'agriculture et la multiplication des usines à lait. Au moins, la France avait-elle toujours défendu ce principe et a réussi à faire reculer ces orientations néfastes", avait encore déclaré François Bayrou.
"Aujourd'hui en quelques mots tout ce travail est ruiné alors même que la parole du gouvernement était engagée auprès des agriculteurs et des éleveurs. Il y a les signes de l'abandon d'une certaine idée de la politique agricole européenne et française", avait-il conclu.

Quelques pistes : Veille stratégique, politique européenne et promotion des produits locaux
C’est ici l’occasion de pointer l’importance de la veille stratégique et économique pour les entreprises, afin que celles-ci puissent anticiper au mieux les décisions politiques, nationales comme européennes si importantes pour leur avenir.
Mais bien sûr il convient par ailleurs d’avoir des relais efficaces au sein même des endroits où se prennent les décisions qui engagent la vie des exploitants et industriels laitiers.
Les élections européennes sont à ce titre le meilleur moyen de choisir ceux qui représentent le mieux nos intérêts agricoles.
Il est, au passage dommage de constater le peu d’intérêt que suscitent ces élections chez une majorité de nos concitoyens !

Enfin, il faut souligner l’importance que revêt la promotion des produits locaux aussi bien par les producteurs que les réseaux distributeurs, autant localement que nationalement et pourquoi pas mondialement : après tout, la majorité des ventes du Roquefort n’est elle pas faite aux Etats-Unis ?

Le produire en France c’est aussi ça : faire savoir que nous savons fabriquer des produits de qualité !




2 commentaires:

  1. Honteux de faire de la politique sur le dos de producteur et d une usine qui aurait et qui peut tourner avec moins de laitage et moins de salarier ils étaient une 20aine de salarier alors que pour la production de cantal on compte 1salarier pour 1 millions de litre a la fin de l entreprise forez fourme transformait 4million alors meme si la fourme demande un peu plus d ouvrier mais pas de la. A en avoir 20. Deuxièmement le problème est lors de la reprise de mr duris ,mr durais a clairement dit qu il ne reprenait pas tout le litrage 5millions de trop mais il devait signer un contrat avec Leclerc qui l obligeait a reprendre le plus vite possible la fnpl lui a dit qu il s occuperait de ce litrage le plus rapidement possible ceci n a pas ete régler du tout mr duris c est retrouver avec la meme entreprise que l Urcvl l Urcvl avait une usine a villefranche qui tournait ils fallait faire reprendre le laitage a celui qui reprenait villefranche la frnpl et la fnsea n a pas fait se qu elle avait promis il faut que chacun prenne sa responsabilité dans cette affaire et je suis contre de faire l apologie d un politique que ce soit Bayrou Sarko ou Hollande ou d autre sur le dos de ces producteur

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  2. Madame, Monsieur (je ne sais pas...)

    Tout d'abord merci malgré tout d'avoir pris le temps de lire ce billet et ce même si votre commentaire est un peu "vif" on va dire!
    J'ai malgré tout voulu le diffuser (je peux effectivement filtrer les commentaires si je le souhaite ce que j'espère n'avoir jamais à faire d'ailleurs).
    Bref, passons...

    Sachez que cet article a pour but essentiel de faire connaitre le cas douloureux de la société Forez Fourme.

    Je me suis efforcé du mieux que j'ai pu de donner des explications non nécessairement reprises par la presse généraliste même locale, en allant interroger certains acteurs du dossier, du moins ceux qui ont bien pu ou voulu me répondre...

    Croyez-moi, cela m'a pris du temps pour savoir comment tourner mes phrases car je sais combien le sujet peut être sensible.

    Ainsi j'ai passé du temps à vouloir comprendre les enjeux d'un problème concernant un milieu qui ne m’est pas familier je l'avoue.
    J'ai même pris une demi-journée de congés sur mon temps de travail pour le rendre à la manifestation de Montbrison afin d'essayer de recueillir sur place des témoignages et entendre de vive voix le résultat des négociations à la sous préfecture.

    Cela dit si vous trouvez les explications incomplètes, les commentaires sont disponibles et je vois que vous en avez profité et c'est tant mieux...
    D'ailleurs j'invite toute personne intéressée à faire de même!

    Sauf que je me permets toutefois de vous répondre sur un point:
    Vous m'accusez de faire de la politique sur le dos des producteurs et je m'en défends : je n'ai fait que rappeler la position de François Bayrou sur la politique de diminution des quotas laitiers, ni plus, ni moins.

    En espérant avoir dissipé un malentendu...
    Cordialement,
    Vincent Fournigault

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